Interview sur France info le 2 mai 2024 (cliquez sur 10h affichez les chroniques puis 10h32)
L’APHP est le plus grand CHU de France et même d’Europe.
C’était le fleuron du système de santé français, l’excellence de la médecine, le lieu où chaque patient souffrant de pathologies graves voulait être soigné, l’institution dans laquelle chaque étudiant de médecine rêvait de faire un stage, son internat et d’y exercer ensuite.
Ça, c’est le passé
Premier trimestre 2024, l’intérim à augmenté de 26% à l’APHP, les agences d’intérim ne fournissent pas.
L’intérim à petite dose, c’est une variable d’ajustement indispensable pour nombre d’hôpitaux, institution ouvert 24h/24 et 7j/7 pour la plupart.
L’intérim à haute dose, c’est un poison qui gangrène les équipes, l’organisation des services… et qui fait exploser les coûts.
Ce coûts sont soigneusement maintenus opaques dans l’hôpital public, tout comme le nombre d’intérimaires et les contrats avec les agences d’intérim.
Et alors?
Les comptes des hôpitaux publics, en particulier les CHU et l’APHP sont en dérapage incontrôlé ces dernières années.
Le comité d’alerte aux comptes de la sécu a tiré la sonnette d’alarme le 15 avril 2024 mais tout le monde s’en fout : plus d’1 Mrd € de déficit en 2022, le double est attendu en 2023.
Du jamais vu depuis 1958. Au taux d’intérim qui explose , il faut ajouter les dépassements d’honoraires à l’hôpital public (et donc l’activité privée) qui augmentent de 15% à 20% par an et l’absentéisme qui est autour de 10% en 2022 contre 7,5% en 2012.
Avec de tels exploits, l’activité ne suit pas.
La FHF ne comprend pas que le niveau d’activité à l’hôpital public ne soit toujours pas revenu à celui d’avant Covid, ce qui ne fait qu’aggraver le déficit.
C’est vrai que c’est incompréhensible avec de tels indicateurs de RH !!
Tous les signaux sont au rouge, à l’APHP et à l’hôpital public.
Et alors?
Le problème c’est que cette crise entraine tout le système de santé vers le fond de l’abîme.
Pour preuve la décision de fin mars d’augmenter de 4,3% (presque 2 fois l’inflation) les tarifs dans le public et 0,3% dans le privé.
Les budgets n’étant pas extensibles, pour faire survivre le soldat APHP, on ne peut plus financer le reste au juste niveau.
Avec 44% des dépenses de soins et biens médicaux financés par l’assurance maladie (82 sur 188 Mrds€) dédiés à l’hôpital public, et un taux de croissance supérieur à la croissance des autres postes, l’hôpital absorbe une partie substantielle de la hausse des dépenses publiques.
Si c’était pour avoir un hôpital public attractif pour les soignants et les soignés, qui tirerait le système de santé et la médecine française vers le haut (excellence, innovation, recherche), cet argent serait bien investi, mais on en est loin.
On sacrifie les cliniques privées, ce qui ne peut que générer de la désertification hospitalière.
Après la pénurie des médicaments, la désertification médicale des villes et l’affaire des Ehpads, on n’est plus à ça près, me direz-vous.
Au-delà de sacrifier le privé, cela conduit aussi à ne pas investir à hauteur des besoins dans la prévention, dans la recherche médicale , dans les innovations…
Et oui, chaque partie fait partie d’un tout.
Et alors?
Le fond du problème est que ceux qui pilotent le système sont dans un déni complet de la situation, nos deux Ministres en tête (il faut toujours une tête de pont, dans la crise comme dans le déni).
C’est la politique de l’autruche dans toute sa splendeur.
Amusez-vous à assister à un congrès avec la haute fonction publique ou le Ministre, si vous n’en êtes pas persuadés.
Ces mêmes dirigeants désinforment les autres Politiques et le grand public en leur dressant un tableau biaisé et rassurant, nourrissant l’immobilisme et empêchant toute réforme structurelle.
En fait ce qu’ils disent c’est que s’il ya des dysfonctionnements, il faut regarder du côté des soignants… qui leur répondent bien par un bras d’honneur : l’intérim !
Interview sur France info le 2 mai 2024 (cliquez sur 10h affichez les chroniques puis 10h32)