THE GUARDIAN
Article original
Traduction
Le 6 janvier 2015
Par Simon Jenkins (écrivain et journaliste de renom pour le Guardian et la BBC)
LE NHS NE PEUT SURVIVRE SANS INSTAURER UN PAIEMENT DES SOINS EN DIRECT PAR LES PATIENTS
Rationner l’offre de soins par le paiement peut offenser les traditions, mais rationner par le chaos est cruel
Les politiques sont devenus fous. Le NHS doit être sauvé avec 2 milliards de livres des banques (conservateurs), avec 2,5 milliards de livres à partir des taxes sur les cigarettes (travaillistes), avec 1,5 milliard de livres de taxes locales (travaillistes), avec le même 1,5 milliard de livres pour les infirmières écossaises (travaillistes écossais) ou avec 8 milliards de livres avec les recettes de la croissance (libéraux démocrates). Ou le NHS peut toujours être sauvé par des gains d’efficience (tous les politiques, cette dernière décennie).
Pendant ce temps, six hôpitaux ont déclaré des « incidents majeurs » (accidents sanitaires majeurs). Les services d’urgences et d’accidents sont dans leur pire état depuis dix ans. Il y a un manque chronique de lits et de docteurs pour ces services. Le patron du NHS, ne laisse pas un mois passé sans demander de l’argent en menaçant les ministres, et généralement il l’obtient. Les médecins du NHS, longtemps adeptes du terrorisme financier, tiennent les politiques en joue. Le résultat est une panique politique.
Quand un service est gratuit, la demande est illimitée. Aneurin Bevan (homme politique gallois travailliste des années 50) craignait que le NHS mette les médecins au chômage alors que les citoyens devenaient plus riches et moins malades. Il avait tord. En devenant plus riches, ils vivent plus longtemps et demandent plus de soins. Même lorsque les soins coûtent cher, comme aux USA, la demande augmente fortement, sans bénéfice. En aucun cas, cela peut durer indéfiniment.
Donc que se passe t’il ? Quand la demande est illimitée, l’offre doit être rationnée d’une façon ou d’une autre. Comme le savent les économistes, si ce n’est pas rationné par le paiement – comme c’est le cas dans les systèmes de santé fondées sur l’assurance -, c’est rationné par « l’encombrement», par les files d’attente. C’est exactement ce qui se passe avec le NHS. Le service se dégrade, les riches vont vers les assurances privées alors que les pauvres font la queue, pendant des heures, des jours, des mois. Les performances britanniques sur le cancer (parmi les plus mauvaises d’Europe*) illustrent les conséquences. Plus de Britanniques décèdent de retards de traitement, que dans les systèmes basés sur l’assurance.
Le NHS « frontline » – chirurgies, départements des accidents et des urgences – est paralysé par la pression des visites triviales pour des blessures mineures, des renouvellements d’ordonnances ou juste des visites de personnes seules ou d’immigrés perdus.
En aucun cas, ceci ne peut être durable ni devenir efficace. Des tentatives désespérées de tarification interne ont conduit les départements accidents et urgences des trusts hospitaliers à fermer tant ils perdaient d’argent. Ils ne peuvent pas faire payer ou même renvoyer les patients alcoolisés ou exerçant des nuisances.
De plus en plus de médecins plaident pour un paiement des soins en direct par les patients. Il n’y a pas d’autre façon pour un gouvernement pour restaurer un service 24h/24 et personnalisé de médecine générale. Le rationnement par le paiement peut offenser les traditions, le rationnement par le chaos est cruel. L’Angleterre est à un pas de la mise en place d’un réseau de centres privés pour les urgences et accidents. Cela serait une catastrophe pour le personnel du NHS. Cependant, aucun politique n’a le courage de proposer ce qui est nécessaire pour arrêter cela.
Simon Jenkins